
Evolution et points de blocage du rugby gabonais. Compétitions internationales et l’épineux problème de la subvention jamais perçu en dix ans d’existence. Tout est dit dans cette exclusivité.
Gabonallsport : Une année s’achève et c’est une autre qui démarre. Que retenir du rugby gabonais ?
Jean-Marc Laissy : « Des bonnes nouvelles. Nous étions à six clubs en championnat et aujourd’hui nous sommes à 11 clubs dont 8 titulaires et 3 en devenir dont Oyem, Moanda et Lambaréné. Il s’agit de clubs mis en place par des enseignants d’EPS que nous avons formé pendant 5 ans à l’INJS, aujourd’hui affectés dans ces localités. Et c’est grâce à eux qu’on commence à implanter le rugby dans ces provinces.
Cette année, on continue dans la même lancée avec 5 autres déjà en formation et cela fera du bien pour l’avenir.
Quant au championnat, il a débuté en septembre jusqu’à janvier dernier avec la phase aller et dès ce week-end, nous attaquons la phase retour. Une autre bonne nouvelle, c’est la création d’un 2e club à Port-Gentil qui était en gestation depuis quatre mois. On les attend d’ailleurs à la dernière séquence du championnat en mars prochain.
Et là, nous allons passer désormais à un gros effectif avec des projets plus agréables pour l’avenir.
Quels sont les enseignements tirés de la première sortie hors du pays d’une équipe nationale gabonaise de rugby ?

Nous étions inscrits à Rugby Afrique qui est la première étape pour entrer dans la grande famille du rugby mondial. Et cela doit passer par la participation aux compétitions de Rugby Afrique où il faut gagner au moins un match. Mission récemment réussie du président fédéral que je suis lors de notre participation au Tournoi international de Dakar 7’S en décembre dernier.
Nous avons affronté des équipes qui jouent depuis des années et qui sont d’un niveau suffisamment élevé que le nôtre. Grâce à nos sponsors, on a pu trouver les moyens de nous déplacer et le temps de faire une petite préparation grâce à nos partenaires français du 6e Bima. Cela nous a permis de voyager dans un état d’esprit positif malgré le niveau élevé de la compétition.
Nous avons gagné la Mauritanie à deux reprises. Nous sommes passés à côté d’une victoire face au Mali par inexpérience à une minute de la fin du match. Objectif donc atteint. Le Gabon a désormais sa place mais il y a du travail à faire.
On va continuer à frapper aux portes de l’Etat dont nous n’avons rien reçu depuis dix ans d’existence officielle de la Fédération gabonaise de rugby. Nous avons les capacités de participer chaque année à ce tournoi et j’ai la conviction, au regard de la volonté de nos joueurs, qu’avec le soutien de l’Etat, nous le gagnerons dans quatre ans.
Depuis dix ans, c’est les sponsors qui nous soutiennent et je crois qu’il est temps que l’Etat revoie sa copie de notre discipline. Pour le moment, nous n’avons que 400 licenciés et nous voulons nous investir dans les écoles, collèges et lycées afin d’avoir un panel plus large qui aboutira à des équipes fortes pour une sélection nationale plus compétente et plus compétitive.
Pour l’instant, c’était la volonté de quelques jeunes que nous avions avec d’ailleurs des blessés et sans expérience.
Si après un moment on se rend compte qu’on n’est pas soutenu, on met fin à la Fédération et on passe à autre chose.
Vous revenez de RDC pour rencontrer le Président de la Fédération de rugby de ce pays. Peut-on savoir l’objet de ce déplacement ?
Je viens effectivement de passer trois jours en RDC où je suis allé rencontrer le président fédéral, M.Herman Mbonyo Lihumba, avec qui nous avons des échanges réguliers depuis quatre ans. Avec une fédération de 3 à 4000 joueurs, ils ont aussi un très bon niveau.
Dans le cadre du développement du rugby, nous avons un projet de créer dans la zone centre un pool de pays capables de se rencontrer les uns les autres. Il s’agira de mettre en place un championnat des clubs et des équipes nationales sur sept pays afin d’avoir des compétitions chaque année et d’être présents lors des grands tournois internationaux.
Donc la RDC, le Cameroun, le Tchad, la Guinée Equatoriale et le Gabon sont déjà partants. Il reste à finaliser avec la RCA, le Congo.
Et avec le Président Mbonyo, on est parti pour la création d’un fonds de solidarité et d’entraide
Qu’en est-il exactement de la question de la subvention ?
Sans savoir comment ça se passe dans les affectations des budgets des fédérations. Il y a dix ans, on a reçu un document de la tutelle qui faisait état d’une subvention annuelle de 50 millions de FCFA et qui devait évoluer vers 150millions de FCFA avec la mise en place des équipes nationales.
Depuis dix ans que nous réclamons cet argent, nous ne l’avons jamais eu au prétexte qu’il a été utilisé pour autre chose. Un an deux ans, ça peut se comprendre mais dix ans, on ne comprend plus rien.
Au rugby tout le monde est bénévole mais cette subvention peut nous permettre de faire un travail de promotion de la discipline sur le terrain.

Comme je l’ai dit plus haut, on va continuer à frapper aux portes de l’Etat et si après un moment on se rend compte qu’on n’est pas soutenu, on met fin à la Fédération et on passe à autre chose.
Il y a une forte demande au niveau national depuis quelques temps. Faut-il tuer tout cela ? En tout cas, on ne perd pas espoir.
Cela bloquerait-il toutes les perspectives ?
On a toujours des perspectives. Cette année, c’est déjà l’équipe nationale et un tournoi international. Nous venons de signer une convention avec le 6e Bima qui nous ouvre son stade tous les samedis pour le suivi d’une sélection de 27 joueurs pour l’équipe nationale.
Pour l’instant cela fonctionne encore avec les moyens privés. Avec les dix ans de notre fondateur qu’on doit célébrer cette année, le Challenge Jean-Pierre Jullia promet des moments forts.
Un mot de fin M. le Président ?
Tout simplement que c’est difficile de se battre seul. Les jeunes demandent de plus en plus à pratiquer le rugby. Mais on a l’impression qu’on dérange certaines sensibilités quelque part. Et c’est regrettable. Il faut que cela change ».