Qualification des Panthères pour la Can, le banc de touches des nôtres, le championnat national et l’aide Covid-Fifa. Il ne fait pas dans la langue de bois !
Gabonallsport : Un mot sur la qualification des Panthères pour la CAN 2021 ?
Paul Kessany : « Etant l’un des favoris de notre groupe de qualification avec la RDC, le Gabon s’est logiquement qualifié. Félicitations aux Panthères qui vont prendre part à la CAN au Cameroun en janvier 2022, même si la logique sportive n’a pas été respectée. En effet, la Gambie s’est hissée en tête de la poule au détriment de la RDC et du Gabon, preuve si il en est, qu’il faut être prudent, et prendre tous les futurs adversaires avec sérieux.
Le banc de touche des Panthères pose un problème. Une ou deux propositions de Paul Kessany ?
La profondeur de banc au niveau des sélections nationales est un problème structurel, qui constitue un véritable écueil, dans la volonté affichée des Panthères d’aller le plus loin possible dans les compétitions de haut niveau.
L’inertie de notre DTN (Direction technique nationale), dont on a du mal à percevoir la lisibilité au niveau de la politique de détection et du suivi des joueurs, corrélée à l’absence de la tenue régulière de championnats (D1, D2, D3, D4, féminins, jeunes, ligues, sous-ligues…), ne permettent pas aux footballeurs locaux de progresser normalement et de créer une certaine émulation localement et au niveau continental.
L’écart moyen se creuse irréversiblement entre ceux-ci et les joueurs expatriés. La relance organisée et pérenne de ces différents championnats, de la base jusqu’au niveau « amateur » de D1, s’avère désormais vital, si nous voulons fournir quelque peu le vivier des talents gabonais.
En regardant la situation actuelle, avez-vous l’impression d’une année sportive blanche au Gabon ?
Nos championnats sont interrompus depuis plus de 400 jours (13 mois), et il ne fait plus aucun doute que nous nous dirigeons toutes voiles ouvertes, vers un naufrage sportif, économique et humain, en l’occurrence « une année blanche sportive ».
Ce, d’autant plus que la FEGAFOOT ne semble pas engagée dans un plaidoyer actif, auprès du gouvernement, pour que les championnats reprennent au plus vite.
Au stade actuel, même une « formule play-offs raccourcie », n’est presque plus logistiquement tenable. Laisser planer le doute sur une reprise éventuelle dans l’esprit des clubs est juste repousser l’inéluctable. Il faudra bien le leur dire, et le plus tôt serait l’idéal, car être président, c’est aussi prendre des décisions, même si parfois elles sont difficiles…
Aide Covid : fonds de la division ou de la providence ?
Le fonds Covid 19 de la FIFA, institué par la circulaire N° 1725 en date du 29 juillet 2020, à destination des fédérations des 211 pays et territoires la constituant, est bien évidemment, une marque de solidarité et un soutien vital, dans le cadre de la grave crise sanitaire actuelle.
Il vient en droite ligne, après l’arrêt de toutes les compétitions en mars 2020, pour soutenir « les acteurs impactés » par les pertes des contrats et relancer dans les meilleures conditions, les différents championnats (voir précisons dans la circulaire).
Ce plan d’aide s’élève à 1 500 000 dollars US (682 500 000FCFA : ndlr) répartit de la manière suivante : 2 enveloppes de 500 000 dollars US (227 000 000FCFA), et une enveloppe spécifique de 500 000 dollars US le cas échéant, pour le football féminin. Mais le Gabon n’ayant pas de championnat régulier féminin, il n’a donc pas pu candidater pour cette tranche du plan d‘aide.
La gestion de ces fonds par la FEGAFOOT a entraîné de vives polémiques au sein du milieu footballistique, notamment au regard des critères d’attribution, des quotités définies, ainsi que des modes de versement (espèces, chèques…).
Tout observateur attentif a pu constater ce qui ressemble étonnamment à une distribution d’argent, à des acteurs plus forcément en activité, pour régler d’anciennes dettes, ouvrir une boutique de merchandising (hors CAN et en pleine pandémie tout de même… ! ) mais surtout au détriment de ceux qui constituent les forces vives de notre sport.
Tout ce capharnaüm s’est opéré comme s’il s’agissait de se faire une bonne conscience et de susciter sympathie et adhésion auprès d’une large frange des acteurs du football, qui sont en porte à faux, avec la gestion du bureau fédéral actuel.
La précampagne officieuse pour la réélection à la présidence de la FEGAFOOT en 2022, semble belle et bien lancée avec l’argent de la FIFA.
Toutes ces turpitudes auraient pu être évitées par exemple, si le Congrès, en lieu et place du Comex, s’était saisi de cette question sensible et avait défini les modes et clés de répartition.
Plusieurs pays comme Madagascar ont pris sur eux d’utiliser ce fonds Covid pour soulager les ligues, les clubs et financer le protocole sanitaire, permettant de protéger les intervenants lors des matchs du championnat. Voilà un exemple qui doit faire école en temps de crise…
Au final, ce plan d’aide a encore plus profondément clivé les positions, et « de facto » éloigné les différents acteurs. Je pense ici à l’incident avec l’ANFPG, qui marque une profonde rupture entre la Fédération et les footballeurs et qui aura forcément des incidences négatives pour les sélections nationales.
En toile de fond ici, on dénote toujours cette mauvaise organisation, ce rapport si particulier à l’argent qui dénature notre sport, que l’on retrouve à tous les niveaux…
Un mot de fin ?
Notre football traverse de fortes turbulences et la récente qualification des Panthères pour la CAN 2021 n’est point synonyme d’une bonne santé. C’est l’arbre qui cache la forêt…
Les prochains mois vont être décisifs, à travers le renouvellement des instances dirigeantes de notre football, des ligues jusqu’au bureau fédéral. Je saisis cette opportunité, pour inviter l’ensemble des acteurs du football à une prise de conscience, et un engagement pour une « UNION SACREE » qui va insuffler une dynamique de travail, de rigueur et de probité ».