
Son début à Lambaréné comme jeune footballeur, son capitanat des Panthères puis le Conseiller Spécial du Président de la République. Le tournoi 33 Export, JET 2025 et bien entendu les éliminatoires de la coupe du monde 2026. Tout y est !
Gabonallsport : Vous êtes un personnage qu’on ne présente plus dans le monde du sport au Gabon et du football en particulier. Quel est le mot qui vous résume en tant que sportif ?
Paul Ulrich Kessany : « Engagement. Voilà le mot qui me vient spontanément. Que ce soit sur un terrain, dans un bureau ou face à des jeunes, j’ai toujours donné le maximum de ce que j’avais à offrir. L’engagement, c’est ce qui fait qu’on ne lâche jamais, même quand les choses ne se passent pas comme prévu.
Votre carrière est un modèle inspirant. Le petit Kessany de Lambaréné est devenu capitaine des Panthères du Gabon. Peut-être un mot aux jeunes talentueux ?

Je leur dirai : “Continuer à rêver, mais n’oubliez jamais de travailler.” Le petit Paul de Lambaréné avait des rêves, mais il ne pouvait pas imaginer tout ce chemin. Ce qui compte, c’est de garder cette innocence du début, cette joie pure de jouer au ballon, même quand les enjeux deviennent plus grands. Et surtout, restez humbles car le football vous apprendra toujours quelque chose de nouveau.
Quel est le match qui vous aura marqué le plus dans votre carrière ?
Sans hésiter, Gabon-Cameroun en Angola, en janvier 2010. Il y a eu quelque chose de magique ce soir-là. Battre les Lions Indomptables, une équipe classée 11e mondiale, franchement, personne n’y croyait vraiment.
Au coup de sifflet final, j’avais ressenti une émotion que je n’arrive toujours pas à décrire aujourd’hui. C’était bien plus qu’une simple victoire. c’était la preuve que nous, les Panthères, nous avions notre place et que notre participation à cette CAN n’était pas fortuite. Ce moment-là justifie à lui seul tous les sacrifices, toute cette passion pour le football.
Candidat malheureux à la ligue de football de l’Estuaire il y a quelques années. Considérez-vous cela comme un échec ou une étape ?

Une étape, sans hésitation. Cet épisode m’a beaucoup appris sur les réalités du football administratif. Parfois, il faut accepter que le timing ne soit pas le bon, que les circonstances ne soient pas réunies. Mais les idées qu’on portait alors, on les retrouve aujourd’hui dans d’autres projets. Rien n’est jamais perdu quand on croit en ce qu’on fait.
Vous avez toujours paru être quelqu’un de méthodique en tant que joueur, pas extravagant, juste efficace et concentré. Où mène cette méthode exactement ?
Cette méthode vient peut-être de mes origines modestes. Quand on n’a pas tout, on apprend à optimiser ce qu’on a. Au football comme ailleurs, j’ai toujours pensé que la régularité battait l’improvisation. Cette approche me guide encore aujourd’hui dans mes projets. On construit pierre par pierre, on ne brûle pas les étapes.
Coordonnateur du Corporate Championship 33 Export. Une compétition qui fait réfléchir.
Nous avions constaté, à l’époque, qu’il y avait un manque. Le sport d’entreprise existait peu au Gabon, alors que c’est un formidable vecteur de cohésion sociale. Les entreprises ont des employés qui ont envie de se retrouver autour d’une passion commune. C’était une évidence de créer cette passerelle entre le monde professionnel et le sport.
Les objectifs sont-ils atteints ?
On est sur la bonne voie. La participation grandit chaque année, l’engouement également. Mais atteindre un objectif, c’est souvent se rendre compte qu’on peut viser plus haut. Aujourd’hui on réfléchit à l’élargissement à d’autres provinces, à l’inclusion d’autres sports. Le succès nous pousse à être plus ambitieux.
L’idée, c’est de faire de cette compétition un rendez-vous incontournable du calendrier sportif gabonais. Et pourquoi pas une dimension régionale à terme.
Conseiller Spécial du Président de la République en charge du sport. Et voici le projet JET Sportifs. Quel est l’objectif recherché par le Chef de l’Etat dans ce projet ?

Le Président de la République, Chef de l’État, Chef du Gouvernement a une vision claire : détecter et accompagner nos talents de demain. JET Sportifs, c’est sa volonté de donner à chaque jeune Gabonais, peu importe d’où il vient, une chance de révéler son potentiel. C’est un projet d’équité territoriale et sociale par le sport.
On ne se contente plus de paroles mais on passe à l’action. Et pour quelqu’un comme moi, qui vient du terrain, c’est un privilège d’avoir un dirigeant qui tient parole.
Peut-on avoir un gros plan sur ce projet ?
On couvre six disciplines dont le football, le basketball, le handball, le volleyball, le judo et le taekwondo, pour les 8-16 ans. Le principe, c’est de s’appuyer sur les ligues et sous-ligues qui gèrent la partie opérationnelle des tournois. Elles connaissent le terrain, les réalités locales. Notre rôle, c’est de coordonner et d’amener l’expertise technique.
Ensuite il a fallu faire venir des recruteurs de grands clubs européens pour une vraie détection de talents. Nous avons bien évidemment commencé par l’Estuaire comme phase d’apprentissage. Après, on adaptera ce qu’on aura appris aux autres provinces, parce que chaque région a ses spécificités.
Pour la réussite, il faut être patient. Dans 5-10 ans, si on retrouve des jeunes issus du JET dans nos sélections ou à l’étranger, alors oui, on aura atteint notre objectif. Retenez que les vraies réussites se construisent dans la durée.
Quel bilan du JET 2025 ?
Objectivement, je suis satisfait de cette première édition qui a largement dépassé nos attentes. Nous avons touché directement plus de 3 000 jeunes et nous avons pu identifier une centaine de profils vraiment prometteurs sur les six disciplines. Mais ce qui est encore plus réjouissant, c’est cet engouement populaire qu’on n’osait pas forcément espérer à l’entame de cette aventure.
L’implication des ligues et sous ligues, l’adhésion du public et des familles est, à mon avis, notre première victoire.
Ceci étant, nous pouvons également nous réjouir de ce que dans les prochains jours, plusieurs des jeunes talents qui ont séduit les recruteurs internationaux que nous avons fait venir effectueront des stages de perfectionnement en Europe, et d’autres suivront progressivement.
Quelles sont les leçons tirées ?
Cette première expérience nous aura confirmé ce que nous pressentions déjà : la jeunesse gabonaise possède un potentiel immense, et elle ne demande qu’à être guidée et accompagnée. Tout au long du programme, nous avons été témoins d’un véritable enthousiasme, non seulement de la part des jeunes, mais aussi de l’ensemble des acteurs de l’écosystème du sport amateur.

Nous avons fait le choix de confier la gestion opérationnelle aux ligues et sous-ligues, et objectivement, je crois très humblement qu’elles sont les architectes de la réussite de cette phase expérimentale. Nos jeunes ont besoin de rêver, et nous savons que beaucoup de talents se perdent faute d’opportunités. L’arrivée des recruteurs internationaux a ajouté une toute autre dimension à ce programme : elle a ravivé en eux le désir de se dépasser et a ouvert des perspectives concrètes à l’étranger.
Nous sommes naturellement conscients que plusieurs choses restent à améliorer mais l’essentiel est là, les bases sont posées.
Le Gabon joue sa qualification historique pour la Coupe du monde face surtout à la Côte d’Ivoire. Réaction ?
C’est excitant et stressant à la fois, mais surtout galvanisant ! Cette génération a le potentiel pour rivaliser avec les plus grandes nations africaines. Contre la Côte d’Ivoire, il faudra jouer sans complexe.
Je crois sincèrement que le Gabon est capable d’aller chercher cette qualification historique ».